[AMS] Vaincre la solitude ...

"Rien ne peut être fait dans la solitude." Pablo Picasso
Qu'est-ce que la solitude ? Est-ce une émotion ? Un état ? Pour moi c'est un ressenti, c'est un nom que l'on donne lorsqu'on est rejeté et aussi un moment que je crains. Quand vous écoutez votre musique préférée, vous savourez ce moment mais lorsque vous réalisez que la fin du morceau arrive, vous ressentez un pincement au cœur. C'est exactement ce que je ressens quand je remarque que j'ai été entouré toute ma vie et que suite au changement de direction qu'a prit ma vie, je risque de rester seul. La vie est amère et cruelle, il faut s'en rendre compte. Soit elle nous sourit et nous amène que du positif, soit elle t'enfonce sa malchance dans l'luc et même avec la plus grande volonté du monde tu n'en ressors pas la tête. Voilà pourquoi j'ai peur de la solitude et la première journée au centre n'a fait qu'aggraver ma peur. Les quelques contacts entre coéquipiers que j'ai pu constater n'étais que pure violence et insulte et tout cela n'est pas de mon monde d'observation et de réflexion. Mes amis, j'ai peur de cette nouvelle page qui se tourne, même si parmi toute les choses ingrates que je remarque je suis heureux de me retrouver avec Phindo, lui qui saura toujours prendre soin de moi. Les responsables du centre, afin de nous aider à mieux s'intégrer, ont organisé les chambres en binômes afin de créer des amitiés. Malheureusement pour moi, je suis tombé sur un type fantôme qui pète pas un mot et qui a une sale tête. Décidément, la chance ne veut pas être de mon camp.
Même si tout me semblait un peu contre moi, je venais de me voir attribué la chambre 16, mon numéro comme dortoir. C'était pas très grand et un grand arbre se situait face à la fenêtre, ce qui donnait une petite ambiance fraîche dans la pièce grâce à l'ombre qu'il nous procurait. Je prenais soin de mettre mes affaires dans mon armoire avant d'aller fouler un peu les terrains synthétiques du centre et, on ne sait jamais, voir comment les autres se débrouillaient.

Le début de saison arrivait de plus en plus vite et quant à moi, je me retrouvais toujours aussi seul. Je ne savais pas comment me sortir de ma solitude car je ne voyais jamais Phindo excepté lors des repas. Parmi les U17, je paraissais être le seul à souffrir de la distance qui me séparait des miens. Je téléphonais une fois par jour à ma mère afin de garder de ses nouvelles et savoir ce qu'il se passait là bas. J'ai donc appris que ma mère venait d'être déclarée séropositive par les médecins et j'entrepris donc de la ramener en France afin qu'elle puisse être hospitalisée. Je n'ai que 16ans, je ne peux pas encore faire toutes les démarches pour m'en occuper seul. Grâce à l'aide du traducteur que le centre a mis à notre disposition, j'ai pu écrire une lettre aux dirigeants avant de me mettre en route pour mon premier match sous le maillot de l'INF, face aux jeunes de l'OM. Voici la lettre :

"Étant arrivé en France suite à un exil avec mon demi-frère Phindo que vous avez aussi accueilli dans votre centre, j'ai du abandonner ma famille et donc laisser ma mère à Manzini où il n'y a aucun confort de vie. C'est donc pourquoi je viens vous demander si vous pouvez soit lui trouver un logement social dans la région afin de l'aider à se sortir de la pauvreté ou bien même lui offrir un poste de cuisinière dans le centre vu qu'elle a toujours eu un talent inimitable pour faire de tout ce qu'elle trouvait de comestible un plat merveilleux."

Le match en lui même était juste épouvantable, exécrable. Aucun de nous n'a pu aligner plus de trois passes ou bien même faire une passe dans les pieds. Le match finit tout de même en notre faveur avec un but de Slade, l'anglais-gallois je sais pas trop quoi, un melting pot bien costaud. Moi même sur le terrain je n'avais pas montré une grande image de moi. Je dois avouer que j'étais plus préoccupé par l'avenir que ma mère que par une prestation que de toute façon la majorité de l'équipe a foiré. Maintenant que le match était terminé, j'allais enfin pouvoir savoir si ma mère allait me rejoindre ici. Les dirigeants m'invitèrent dans leur bureau afin de débattre du sujet. C'est donc avec pessimisme que je me dirigeai dans le bâtiment vers ce local où la vérité allait sûrement être difficile à avaler. En effet, c'est dans cette énorme pièce, remplie le dossier sur les joueurs, de matériel footballistique et de technologies certainement inutiles dans un bureau que le refus catégorique me fut communiqué. Le fait de savoir que je ne reverrai sans doute jamais ma mère me fit mal, très mal et je n'avais qu'à m'enfoncer dans ma tristesse ...

Je le sentais lors de mon arrivée, mon intégration serait difficile. Mon doute était fondé car je suis seul. Seul de chez seul, je n'ai de contacts avec personne, mon colocataire se fait la malle et moi je reste isolé dans ma chambre, du Kid Cudi à fond et la solitude pour meilleure amie. C'est ça la vie de footballeur ? Glander 2h par jour sur un terrain sans objectif ni raison, sans même toucher une balle et après se reposer dans sa chambre, se relaxer d'un effort qu'on a pas fait ? En tout cas, c'est ma vie. Heureusement que Phindo lui s'en sort en U19. Moi ... j'en ai marre. C'est décidé, ce soir, après l'entraînement et une bonne douche, je fugue. Où ? Je ne sais pas. Pourquoi ? Pour changer d'air, changer d'idées … Mais avant de pouvoir partir, je vais encore me faire chier deux heures sur un terrain à me faire gueuler dessus alors que les autres vont dire et faire des conneries à la pelle. Je fais simplement une surdose de cette VDM.

***

« Mais bon dieu ! C'est si compliqué d'évoluer en une-deux et de finir ce putain d'exercice par un tir en un temps ? Mais qu'est-ce que tu fous ici ? Va à la douche et bouge ton cul ! »
Encore un entraînement écourté, bien que cette fois-ci, c'était totalement volontaire de ma part. Je pris bien mon temps sous cette douche chaude, je mis mes vêtements et je quittai le vestiaire en toute discrétion. Je longeai le mur vers la sortie et vis qu'un panneau « Centre-Ville 4 » me faisait face. En bref, je devais marcher une bonne demi-heure avant d'enfin pouvoir me reposer tranquillement pour cette nuit. J'avais volé le MP3 du gardien portugais avec qui je partageais ma chambre avant qu'il ne parte et donc j'avais de quoi passer le temps en marchant.
Après une bonne demi-heure de marche, je me retrouvais face à la gare de Clairefontaine-en-Yvelines, où un train me conduirait vers Paris où je passerai la nuit. Le train arriverait dans 20 bonnes minutes, c'est parfait, le temps pour moi d'aller trouver un truc à manger.

***

Me voilà dans le train direction Paris, sans savoir que faire. Je vais surement devoir faire face à la délinquance de Paris connue internationalement. Je pense pas que ça doit être si terrible, surtout quand on voit que j'ai tout de même côtoyé certains cas comme Derron ou bien Roberto ... Rien ne m'effraie et c'est droit devant que je vais, sans même me retourner vers le passé et si possible, sans même revenir à l'INF ...

Heureusement, le voyage en train n'était pas si long, ce n'était qu'une question de douzaine de minutes environ. J'en avais profité pour à peu près voir ce que je pourrai faire un fois arrivé. J'ai toujours su que je n'étais pas doué niveau organisation mais dans ce cas-ci, je l'ai bien prouvé. J'ai donc décidé de tout faire à l'improvisation, car on dit souvent que les meilleurs souvenirs de notre vie viennent d'une décision instantanée. Le train rentrait en gare, tout doucement et les portes s'ouvrirent. Je connaissais déjà cette gare mais l'heure modifia beaucoup l'allure qu'elle avait et l'impression qu'elle donnait. C'est sans doute aussi l'heure avancée de la journée qui fit qu'une bande de jeunes m'aborda. Comme tout le monde le sait bien à propos de ce gang de training dans les chaussettes, de casquettes à l'envers et de langage vulgaire, ils se ramènent en bande. Une bande de 14 pour être précis.

« Wesh, pourquoi tu m'regardes ? »

Je ne savais pas quoi répondre de par la barrière linguistique mais aussi car ce bougre m'agressa sans aucune raison et une réponse mal casée pourrait me coûter cher. Je réfléchissais bien à mes mots mais au final, je ne dis rien et commençai à détaler. La bande de chieurs me suivirent et cette course-poursuite ne se finit pas. Les rues étaient très sombres malgré l'éclairage présent et je profitais de cette obscurité pour m'introduire dans un bar bondé de gens totalement ivres qui regardaient un match de football à la télévision. Je regardais l'écran et une des équipes marqua à ce moment là, et c'est là que tout le bar commença à crier « CHICHARITO ». Je vis sur le marquoir que le match opposait Manchester United à Marseille et … un public français supportait les mancuniens et pas leurs compatriotes. La rivalité entre le PSG et l'OM dont j'avais entendu parler était plus grande que je me l'été imaginé. Je réussi à me caser dans un coin du bar et je regardai le dernier quart d'heure du match.

J'avais passé la nuit à marcher dans la ville, évitant les groupes que je rencontrais afin de ne pas m'attirer d'emmerdes. Au levé du jour, je réussi à saisir de quoi manger dans une petite épicerie et je m'installai sur le banc d'un parc afin de manger. La célèbre chanson de Dutronc ne ment donc pas, à 5h, Paris s'éveille. Les gens sont pressés, ils marchent sans regarder où, ils mangent en avançant, ils ont un rythme de vie infernal et moi je suis là, sans savoir quoi faire et prenant mon temps. Sans savoir quoi faire ? Je ne savais pas que l'homme en costume qui s'approchait de moi allait changer mon destin à vie rien qu'avec un « Toi, t'as une tête sympa' »

Le parc était loin d'être vide, les rues alentours aussi mais j'étais sûr que l'homme pouvait me tirer une balle dans la tête sans que personne ne réagisse. Le type maintenait son regard et je n'osais pas voir ses yeux. Mon physique ne me servait à rien car le type était une vraie armoire à glace comme on dit. Aussi grand que large d'épaule et ça m'effrayait. Je continuais donc de mâcher mon pain et le type s'assit à mes côtés. Il posa sa main sur mon épaule et mon réflexe fut de le regarder dans les yeux. Il me regarda en souriant et glissa un billet de 5€ dans ma poche en disant :

- N'aie pas peur, je ne te veux rien de mal, j'ai simplement quelque chose à te demander qui te prendra que 10 minutes si tout est bien fait. Haaa, peut-être que tu ne parles pas français … ¿ Hablas español ? You speak english ?
- Oui, je parle en anglais … Mais que me voulez-vous ? Pourquoi ne pas me laisser tranquille ?
- Je vais pas faire de chichis et je vais te le dire cash. On recherche un type activement car il aurait escroqué un de nos joueurs. Es-tu footballeur ?
- Oui, je joue à l'INF Clairefontaine.
- Ça tombe bien, sais-tu ce qu'est un agent ?
- Évidemment.
- Tu sais donc qu'un bon agent peut te mener loin dans le football ? Et bien je t'explique, je suis un peu un tueur à gage qui travaille seulement pour les agents. Et j'ai besoin de toi pour faire le justicier avec moi.
- Et je dois faire quoi exactement ?
- Rester ici et attendre que le type qu'il y a sur cette photo passe devant toi.

Il me tendit une photo ou je pus voir un homme, typé asiatique avec un petit sourire machiavélique. Moi qui trouvait que tout les asiatiques se ressemblent, celui-ci dégageait quelque chose de mal et je le lisais sur son visage, même si je ne sais pas comment je peux le remarquer sur cette photo. L'homme reprit son speech :

- Voici la cible si on peut dire.
- Mais je dois faire quoi avec lui ?
- Fais lui comprendre qu'on se laisse pas pigeonner ainsi par ici, et t'as carte blanche sur la manière dont tu le fais. Sur ce, moi j'y vais, je suis un peu recherché. Si tu l'as fait, retrouve moi à l'arc de triomphe et tu toucheras ta petite prime de 200€.

A l'ouïe de la somme que je pouvais percevoir, mon choix fut très vite fait. Le gain d'une telle somme me permettrait de faire venir ma mère ici et c'est ce dont j'avais besoin. Je gratifiais donc l'homme d'une poignée de main et lui donnais ma parole car je suis un homme de paroles. J'osais lui demander son nom et il me répondit de l'appeler Kriss.
Le temps passait, le temps commençait peu à peu à se réchauffer et je commençais à m'ennuyer, seul sur mon banc. Au bout d'une vingtaine de minutes, je vis l'homme arriver, la démarche assurée mais il ne savait pas ce qui allait lui arriver. Alors qu'il passait devant moi, je tapais avec le bout de ma chaussure contre sa cheville, là où ça fait bien mal. Le type s'étala à terre et je le pris par le col, tout en le traînant dans les buissons voisins. Le type lâcha un Fils de P*te ! Que je ne manquai pas. C'est la première fois qu'on m'insultait via ma mère et ça, je n'accepterai pas. Un coup de pied dans son ventre, un coup de point dans l'arcade sourcilière. Dans un souffle, l'homme me dit :

- T'es footballeur ? Sois-en sûr, ta carrière est foirée car si t'es là, c'est que ta vie est déjà un échec pauvre con.

Ce type avait réussi à me mettre les nerfs, surement par la vérité de ses paroles mais mes émotions me dépassaient. Avec un seul acte, je réalisai que ma vie allait changer, que rien que cela allait me changer à vie. La colère prenait le dessus et j'agis sans réfléchir. Après lui avoir écrasé les testicules, je me mis à hurler :

- Met toi à genoux ! Met toi à genoux devant LA légende !

Et mon genou partit fracasser son nez, faisait gicler du sang un peu partout et le laissant dans le coma. Amaury Marvin Shuba n'est plus, après le pactole touché et une madre à ramener, il serait temps de se bouger sur le terrain et rassurez-vous, je vais vous prouver qui je peux être réellement.

Vaincre la solitude

Amaury
Scénario 4/9
Contenu 4/6
Application 5/5
+2 de RP