William Holmes-Murena Vanderheren ,sur la route du Languedoc

Je me baladais à présent dans la cité de Carcassonne. Ses murailles gardées quasiment intactes, ses petites échoppes dans les rues pavés de la capitale Languedocienne. C'est vraiment une belle ville, une belle région d'ailleurs bordée par la Mer Méditerranée et à la frontière de l'Espagne. D'ailleurs j'avais été acheté plusieurs cartouches de cigarettes pour me faire des réserves. Avec les bas prix là-bas il fallait absolument que je fasse une halte en Hispanie. Je me trouvais à présent sur une terrasse d'un café à Carcassonne, le barman m'appela :

"Monsieur ! Monsieur !"

Sa voix se répétait dans ma tête. Cependant, elle devenait de plus en plus lointaine, distante.

Je me réveillai soudain. Un homme barbu, environ la cinquantaine je dirais m'appelait en me secouant.

"Monsieur !"

Fils de pute va ! Quel connard de m'avoir réveillé ce pauvre type. Il a que sa à foutre de son trajet, faire chier les gens qui dorment paisiblement ? J'en reviens pas, il y a vraiment des enculés sur Terre ! Je décidai cependant de me contrôler et lui demandai ce qu'il se passait pour qu'il me réveille ainsi.

Le train est arrêté, il doit y avoir un problème... On a décidé d'aller voir le contrôleur pour savoir ce qu'il se passe, vous venez avec nous ?
Non, c'est bon je vais rester là.
Ok...

Il partit avec une tête à la fois déçu mais aussi déterminée. Je jetai un regard pour voir si quelqu'un était resté dans mon wagon. Personne... Tout le monde était partit engueuler le contrôleur alors qu'il y peut rien le pauvre, c'est pas de sa faute si le train a un problème. Le train va sûrement redémarrer dans pas longtemps, il n'y jamais de vraiment gros problème dans les trains. Je me posai donc tranquillement dans le fond de mon siège. Tout d'un coup, je remarquai qu'il y avait du mouvement derrière moi. J'entendais du bruit. Cela devait provenir de cinq ou six rangées de sièges derrière le mien. Je me retournai calmement, comme si je m'attendais à ce qu'un débile mental se jette sur moi et m'agresse. Un homme était en train d'ouvrir une fenêtre. Une fois qu'il eût réussit son entreprise, il passa par l'ouverture et se trouvait à présent dehors, à l'extérieur du train. C'est quoi ce malade ? Le mec il sort du train alors qu'on a pas le droit. Sa me ferais bien marrer si le train redémarre et qu'il reste coincé dehors alors qu'il va faire nuit dans quelques minutes. Je le voyais regarder le wagon de l'extérieur. Je me levai et le regardai depuis la fenêtre par laquelle il était sortit. Il me disait vaguement quelque chose, comme si je l'avais déjà vu. Dans un coup de folie, je passai par la fenêtre pour rejoindre le jeune homme.

On ferait peut-être mieux de rentrer non ? Si le train redémarre on a pas l'air con ici, en pleine nature dans le noir...

Je voyais bien que quand je parlais, il me regardait d'une manière plutôt bizarre. Peut-être que lui aussi pensait comme moi, que l'on s'était déjà croisé ou rencontré quelque part... Il avait l'air un peu dans le vague mais quand il me répondit, il prit de suite un ton limite agressif :

"Premièrement c'était mon idée que celle de sortir en dehors du train.Deuxièmement moi je pense que le train va rester encore bloquer pour longtemps et troisièmement je suis majeur donc si je veux rester longtemps dehors je décide tout seul.Après je ne suis pas opposé a recevoir de la compagnie donc si tu souhaites rester avoir moi tu es évidemment le bienvenue"

Je fus limite choqué par son expression brutale. Je le regardai à présent s'éloigner dans les champs qui bordaient la voie ferrée. Je pris mon paquet de clopes dans ma poche, en allumai une et m'assied. J'avais fumé à présent près de la moitié de ma cigarette quand celle-ci tomba de ma bouche. Elle n'était pas tombé toute seule évidemment, je l'avais lâché en ouvrant la bouche pris d'un soudain excès de panique. En effet, environ 20 mètres derrière moi, le train avait recommencé à rouler. Je couru aussi vite que je le pu vers la fenêtre encore ouverte. Le train prenait de plus en plus de vitesse, je n'arriverais jamais à le rattraper... Je m'arrêtai, tombai à genoux devant le terrible spectacle qui s'offrait à mes yeux. Mon train était partit avec à son bord toutes mes affaires, portable, sacs... Tout, tout venait de partir à toute vitesse vers Carcassonne. L'autre mec semblait aussi désespéré que moi. Il me regarda un instant, les yeux emplis de tristesse ou bien serait-ce de la peur ? J'aurais bien pu me jeter sur lui, le frapper à mort et l'abandonner là, sur le bas côté de la voie. Mais à quoi bon ? Au moins, il sera un compagnon de fortune pour moi, parce qu'on va devoir rester là un bout de temps même peut-être dormir ici... Je m'approchai donc de lui, tendis ma main droite vers lui et me présentai :

Salut, je m'appelle William Holmes... On dirait bien qu'on va devoir rester ensemble pour un petit bout de temps.

La situation me fit limite marrer. Au lieu de le taper, je venais vers lui amicalement, pour me présenter. Quelle ironie quoi. Je regardais au loin sans voir rien, pas une maison, pas une lumière, même pas un abri... On était perdu en pleine cambrousse, dans le trou du cul du monde et il va être dur de trouver quelque chose à manger, à boire... Je rallumai une autre clope, lui en proposai une et m'assied un peu plus loin. Valait mieux s'écarter de la voie, c'était plutôt risqué... Je prenais tout cela avec un certain calme, j'étais plutôt décontracté et je n'avais pas envie de laisser transparaitre ma peur. Je restais donc là, à fumer. Malheureusement, on avait rien à boire, sa aurait pu être encore plus marrant si on aurait pu se bourrer la gueule, sa nous aurait fait oublier notre détresse... Je fouillai dans mes poches, il n'y avait rien... Et c'est à ce moment là que je me rendis compte que mes grands parents allaient venir à la gare pour me chercher et que je n'y serais pas... Ils allaient sûrement s'inquiéter. Soudain, un éclair de génie me frappa.

Euh... Je peux t'emprunter ton portable pour prévenir ma famille que je ne serais pas là à temps ?

Oui bien sur

Il fouilla sereinement dans sa poche à la recherche de son portable, certains qu'il serait à l'intérieur. Il en mettait du temps à le sortir son phone. Puis, soudain, il releva la tête dans ma direction...


Oh ************ j'ai oublié mon **** de portable dans le train ,comment allons nous faire c'était notre unique espoir.

J'explosai de rire. Pas que je trouvais cela marrant mais on aurait dit que tout s'acharnait contre nous. Pas de sacs, mis à part le sac à dos du jeune inconnu, pas de nourriture, pas de boissons. En gros j'avais juste mes clopes, seule chose qui pouvait me réconforter en ce moment de trouble. L'inconnu releva la tête et m'interpelle comme s'il venait d'avoir une idée de génie.


Ecoute il fait nuit noire et nous n'avons rien sur nous pour dormir ,de plus il fait déja froid et la nuit risque de l'etre encore plus ,notre seul espoir est de longer les rails et d"'espérer croiser rapidement un village ou une ancienne maison de la SNCF qui pourrait nous servir de gite pour la nuit.Heureusement j'ai su moi un pull de rechange et de quoi manger et boire.Je pense que nous n'en avons que pour quelques heures de perdition avant de retrouver un contact humain.Avec un peu de chance dans une heure ou deux nous serons dans un lit chaux et doux .Qu'en pense tu.?

L'idée était tentante même si honnêtement cela m'étonnerait que l'on trouve quoi que ce soit par ici... Je gardai cette pensée pour moi, histoire de ne pas le déprimer plus qu'il ne l'était déjà, et nous nous mirent en route. Je commençais à avoir légèrement froid, en même temps on est à la période des fêtes de Noël et je n'ai qu'un petit pull sur moi, c'est tendu quoi... Je ne dis rien encore une fois, de toute façon il ne pouvait rien faire pour remédier à mon manque de chaleur. Je continuai donc la route en silence, regardant autour de moi sans rien voir. Quelques fois, un bruit d'animal qui s'enfuyait à notre approche me faisait sursauter. Il faut dire que se promener en pleine nuit avec un gars que l'on ne connait pas et sans lumière c'est assez flippant. Même carrément flippant. Je décidai d'engager la conversation, je voulais en savoir plus sur cet homme qui m'accompagnait.

Eh en fait, tu t'appelles comment ? Parce que j'ai l'impression de t'avoir déjà vu quelque part mais je ne sais plus où...

J'attendis sa réponse tout en continuant de marcher. Il faisait de plus en plus froid, sa devenait de plus en plus dur, physiquement et moralement. Je n'étais pas du genre à me laisser abattre mais là, j'avoue que je cédais petit à petit dans un désespoir grandissant. J'espérais qu'on rencontrerait bientôt quelque chose, une maison, un abri au moins. On avait l'air de pauvre con là, en pleine nature dans la nuit et le froid qui m'emplissait les poumons à chaque inspiration. Je mis la capuche de mon sweat, les mains dans les poches. Je priais Dieu intérieurement pour qu'il nous vienne en aide, on avait vraiment besoin de lui maintenant.

Tu aurais pas de l'alcool pour qu'on se réchauffe un peu là ?, lui demandai-je le plus poliment possible.

Non désolé ,je ne bois pas ou alors un verre lors d'une fete ou d'un anniversaire donc il n'y aucun chance que j'en ai pris dans mon sac.Par contre si tu veux j'ai de l'eau ou du coca mais bon ce n'est pas ça qui va nous réchauffer.

Merde pauvre mec, sa à l'air d'être une sorte de saint... Il m'avait raconté sa vie pendant un petit bout de temps. Ce n'est pas que c'était intéressant mais au moins je n'entendais qu'à moitié les bruits de la campagne qui nous entourait. On continua de marcher tranquillement, j'allumai la énième clopes de la journée. Il ne m'en restait plus que cinq... Si je n'avais pas de clopes j'allais commencer à sombrer dans la peur. J'arrivais à ne pas y penser pendant que je fumais, je m'efforçais de me concentrer sur ma cigarette et sur la fumée qui sortait de ma bouche, une fois le tabac inspiré puis expiré.

Alors que le silence régnait entre moi et Murena, un bruit des plus étranges vint stopper nos songes. Il y avait du mouvement tout près de nous, on entendait des bruits de pas, des sortes de grognements. Les bruits se rapprochaient lentement, très lentement... Je sentais que Murena tremblait de peur à côté de moi. Je n'étais moi-même pas rassuré du tout... Tout d'un coup, le belge prit ses jambes à son cou et se mit à courir à toute vitesse. J'étais pour ma part resté là, pétrifié par la peur. Je n'entendais plus le bruit, la créature était soit parti suivre Murena soit elle était encore là et attendait juste le bon moment pour se jeter sur moi et me torturer. Je n'en savais rien. Je restai donc là, immobile pendant quelques minutes qui me parurent durées des heures. Je n'osais même pas ouvrir la bouche pour respirer, mon coeur battait si vite et cognait si fort contre mes côtes que j'avais l'impression que ce bruit résonnait dans toute la campagne environnante. Je me décidai à bouger seulement au moment où j'entendis un cri strident dans la nuit silencieuse. Murena ! La bête avait dû l'attraper ! Je courus dans la direction du cri. Je retrouvai sa piste environ trente minutes plus tard quand mon pied heurta son sac à dos. La bête avait dû l'emmener. Je regardai autour du sac pour voir si il y avait quelque chose de spécial, un terrier, une cachette... Rien. Je continuai ma route, complétement désespéré, le sac du belge sur mes épaules. J'avais peur pour ma peau à présent. Je m'inquiétais pour le belge mais une idée envahissait sans cesse mes pensées. Quelle idée ? Simplement qu'une fois Murena mort, la bête viendrait dans ma direction pour me tuer à mon tour.

L'aube était encore loin, de longues heures d'angoisse m'attendaient encore dans cet endroit maudit. Je m'en voulais d'avoir quitté le train, pourquoi avais-je eu cet excès de folie, qu'est ce qui m'était passé dans l'esprit à ce moment là ? Alors que j'étais en train de marcher, je vis quelque chose qui brillait plus bas. Je me penchai légèrement, les mains sur les genoux. Qu'était-ce ? C'était sans doute un bijou, une montre ou un collier... Mais pourquoi était-il si bas ? Et c'est là que je compris que ce trou avait été creusé par des chasseurs, une sorte de trappe, un piège pour animaux. Peut-être que c'était Murena en bas, dans le piège. Un dilemme cornélien se présentait à moi. Descendre dans le trou et attendre que le chasseur revienne pour voir si il avait attrapé quelque chose et en même temps être avec mon congénère, ou alors rester là et attendre le chasseur sans me soucier de ce qu'il avait bien pu arriver au belge. Ma décision était déjà prise mais je ne pouvais me résoudre à accepter l'évidence qui se présentait face à moi. Je me devais de descendre dans ce trou, il ne présentait que des avantages, la bête ne pourrait pas nous atteindre ici, le chasseur reviendra forcément un moment. Le seul inconvénient : le manque de nourriture. A ce moment, je regardai dans le sac de Murena, il y avait de quoi manger pour au moins deux jours. Je sautai donc dans le trou, je fis une lourde chute mais j'étais en bon état. Je me relevai et m'agenouillai aux côtés de Murena, allongé, inconscient. Je pris la bouteille d'eau et lui fis couler quelques gouttes sur le visage. L'opération eût l'effet escompté et le belge commença à ouvrir les yeux...

Sa va mec ?

Il ne me répondit pas de suite... Je voyais bien qu'il était totalement désorienté et qu'il devait avoir mal un peu partout vu les grimaces qu'il faisait. Sa aurait pu faire rire quand on voit quelqu'un dans cet état là, mais franchement, je n'avais pas du tout le coeur à rire. La peur était encore présente, la bête devait rôder aux alentours... Murena me demanda la bouteille d'eau, sa gorge était en feu. Je lui passai et il en but de petites mais fréquentes gorgées. Il avait l'air vraiment mal en point mais malheureusement je ne pouvais rien faire de plus pour lui... Il essaya de se relever, avec mon aide, mais à peine son pied gauche avait-il touché le sol que le Slovèno-belge dû se rasseoir sous l'effet de la douleur. La route était encore sûrement longue et voilà qu'il ne pouvait plus marcher. Le sort semblait s'acharner contre nous...

L'aube approchait, les premiers rayons du soleil matinal filtraient à travers les branchages. Murena me demanda de lui trouver un bâton qui lui servirait de maintien, de béquille. J'en trouvai un assez gros, un qui pourrait supporter son poids. Non pas qu'il soit gros mais trouver un bâton suffisamment épais pour ne pas plier sous le poids d'un homme c'est assez difficile. Mais bon, j'en avais trouvé un et c'était là l'essentiel. Je lui donnai et m'assieds à côté de lui. Je commençai à être vraiment exténué. Le voyage, la peur, tous ces facteurs avaient contribué à aggraver ma fatigue. Difficile de ne pas succomber à l'irrésistible envie de dormir. Murena ayant sans doute perçu mon excès de fatigue me dit :

"William écoute je crois que je me suis cassé ou que j'ai une entorse ,il vaut mieux que je me repose encore un peu ,vu la lumière qui rentre dans ce trou il me semble que nous soyons le jour.Raconte moi ce qui c'est passé cette nuit et si il y avait une bete ou non .Je te propose de te reposer un petit peu si tu n'as pas dormi cette nuit puis de reprendre notre chemin,un baton pour me soutenir devrait faire l'affaire.Quand la bete pour vérifier qu'elle ne revienne pas je monterais la garde pendant que tu te repose ,qu'en pense tu?"

L'idée me séduisait, j'avais énormément besoin de ce repos. Je commençai donc à lui raconter notre aventure contre la bête sauvage.

Alors, nous suivions les rails quand tout d'un coup on s'est stoppé net. On avait entendu un bruit, une sorte de souffle accompagné d'un glissement. On sentait que quelque chose se rapprochait de nous. Au début on a pas bougé. Mais au bout d'un moment, au deuxième grognement, tu t'es mis à courir à toute vitesse à travers champs. Je ne t'ai pas suivis au départ, je suis resté là, immobile. Je n'entendais plus rien donc j'en ai conclu que la bête était partie. Te poursuivre, partie faire autre chose ? Je n'en sais rien. J'ai donc choisi de marcher dans la direction que tu avais prise. J'ai retrouvé ton sac un peu plus loin. Et je t'ai trouvé dans ce trou environ cinq minutes plus tard je dirais. Et depuis nous sommes ici... Donc oui, il y avait bien une bête, je ne sais pas quoi mais elle était là, tout proche de nous sans que l'on puisse la voir. On pouvait juste l'entendre, entendre ses grognements, son souffle roc à glacer le dos.

A la fin de mon récit, je le regardai et lui dis :

Je suis d'accord pour faire une pause. Je suis exténué, si tu veux bien je vais dormir un peu et on repartira après ?

Je m'allongeai dans le coin qui me semblait le plus confortable et fermai les yeux. Je m'endormis aussitôt...